Madame Yvette WALLEMACQ, veuve de Jacques BUGHIN, décédée en décembre 2013, nous avait offert une correspondance émouvante, entre le soldat Victor DONEUX, né à Jumet en 1890 et son père, Aimé WALLE-MACQ, né à Jumet en 1890 aussi et décédé en 1964. Ces deux cousins s’écrivaient beaucoup pendant la guerre, spécialement lorsque Aimé WALLEMACQ sérieusement blessé au bras, se reposait dans sa famille entre 1915 et 1916.
1e lettre, le 23 février 1915: V. Doneux écrit souvent, pratiquement chaque semaine; il y a beaucoup de fautes d’orthographe mais l’écriture est belle et régulière. Les lettres sont écrites à la plume ou au crayon et… il vouvoie son cousin.
En février 1915, il parle des congés des soldats qui se passent à Londres ou en Ecosse. Lui, il est en bonne santé mais beaucoup d’hommes sont tués ! En juin 1915, il est toujours en bonne santé mais son moral diminue ! Il espère la fin de la guerre. « On crève de misère… il fait une chaleur épouvantable dans les tranchées… » Il est en 1° ligne au mois d’août 1915 et se plaint: « la vie est bien dure ». Il explique qu’il doit passer 4 jours en 1° ligne, qu’il a ensuite 4 jours de repos mais pendant lesquels il doit encore travailler…
De plus en plus, il aspire à la fin de la guerre.
En septembre 1915, on supprime les congés.
En novembre, V. Doneux déplore l’arrivée de l’hiver et l’absence d’espoir de paix. On le change souvent de secteur : il va de la 1e ligne au Génie ou dans une compagnie de mitrailleuses… Mais il garde le moral : « nous sommes dans la boue jusqu’aux genoux mais ça n’a pas d’importance quand on est bon patriote … ».
En mars 1916, il se sent de plus en plus déprimé: « j’ai attrapé le cafard… ici c’est toujours la même chose, la tranchée et beaucoup de travail ». Puis, plus de lettre mais une annonce mortuaire car Victor Doneux tombe à l’Yser, le 12 septembre 1916.

Mais que peut-on dire de la « Grande guerre » dite aussi « Guerre des tranchées » ?
Que l’idée de creuser des tranchées n’était pas nouvelle en 1914 puisqu’il existait déjà des tranchées dans les guerres-sièges de l’Antiquité.
Mais il est vrai que c’est surtout au cours de la 1º guerre mondiale que l’enterrement de l’infanterie dans les tranchées fut érigé en système très perfectionné.
Au lendemain de la bataille de la Marne, en septembre 1914, les fantassins ont élaboré une défense improvisée. Les hommes sont épuisés par les immenses efforts des semaines précédentes et alors, ils se « terrent » dans des « trous de renards» afin de se protéger des projectiles. Les trous individuels vont être progressivement reliés entre eux, formant ainsi les premières lignes des tranchées. Les Allemands étaient déjà très spécialisés dans ces fortifications de campagne.
Par le système de tranchées, on privilégie la défense plutôt que l’attaque et c’est d’ailleurs ce qui va caractériser la Grande Guerre.
Entre les combattants des tranchées, il y avait un « no man’s land » qui pouvait parfois être réduit à 30 m. environ… on pouvait s’entendre ! D’immenses réseaux de barbelés protégeaient les tranchées respectives.
En fait, les tranchées se présentaient comme une série de lignes défensives, plus ou moins parallèles mais jamais rectilignes afin d’éviter les tirs en enfilade et limiter la portée des éclats d’obus. Une première ligne était celle du combat: il y avait un parapet fait de sacs de sable, des créneaux, une banquette de tir mais plus avant, des petits postes d’observation. Des boyaux perpendiculaires reliaient la 1° ligne à la 2° ligne de tranchées, munie de barbelés, souvent en contre-pente, pour éviter l’observation par les ennemis ainsi que les tirs adverses. Puis il y avait encore des raccords vers une tranchée de réserve d’où partent de nouveaux boyaux permettant d’acheminer les soldats vers les cantonnements de repos.
Là où les sols sont humides, le maintien en bon état des tranchées était très difficile ! On utilisait des boisages et des fascines pour les parois, les murs et les plafonds et des caillebotis pour le sol. Malgré cela, les soldats avaient parfois de l’eau jusqu’à mi-jambe entraînant quelquefois la maladie dite du « pied de tranchée » qui est une sorte de gangrène.

Ce système de tranchées avait des faiblesses :
– manque de mobilité des troupes
– difficultés du déplacement du matériel
– problèmes d’approvisionnement
– difficultés pour évacuer les blessés dans le dédale des tranchées

Le téléphone de campagne était fragile.
Mais le système des tranchées n’était sommaire qu’en apparence et il y eut une belle extension des techniques d’observation : périscopes, ballons, avions et un développement des techniques de camouflage et des leurres.
Les modes de combat sont recherchés : tireurs d’élite, patrouilles de nuit sur le no man’s land afin de faire des prisonniers.
Il y eut aussi des ententes tacites entre les deux camps, des trêves afin de se rendre la vie moins dangereuse et moins épuisante, par exemple à Noël.
Ce fut donc surtout une guerre de positions, une immense guerre de siège. L’attaque était difficile, voire mortelle.
Le seul moyen de sortir de l’impasse stratégique fut l’arrivée des troupes américaines pendant la seconde moitié de l’année 1918 et surtout, l’association : char-avion.
Nous passons volontairement sous silence de nombreux points qui pourtant méritent d’être abordés :
– l’hygiène
– les loisirs
– la médecine de guerre
– les névroses
– l’équipement des soldats
– les permissions
– le courrier.


A.M.Marré-Muls

BIBLIOGRAPHIE
– Lettres manuscrites.
– Encyclopédie de la Grande guerre 1914-1918, sous la direction de Stéphane AUDOIN-ROUZEAU et Jean-Jacques BECKER, Paris, 2013. p. 235-241.

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