Brighton, le dôme du Pavillon royal, samedi 6 avril 1974,

Un acronyme allait être synonyme de phénomène mondial de pop culture, qui traversera un demi-siècle, sans coup férir: ABBA. Fondé à Stockholm le 1er novembre 1971 il se compose Agnetha Fältskog, Benny Andersson, Björn Ulvaeus et Anni-Frid Lyngstad. Et il y a donc très exactement 50 ans, ABBA remportait le Concours Eurovision de la Chanson. Avec Waterloo.

Alors, le Mémorial 1815 de Waterloo, qui a pour vocation de faire revivre l’histoire de la Grande Bataille à travers des uniformes, des objets historiques, des cartes animées, un film 3D, n’a pas hésité à faire le grand écart… et même si la chanson a vraiment peu à voir avec l’Histoire: il s’agit là de l’histoire triste et banale d’une femme qui renonce à son amour, comme “à Waterloo, Napoléon a capitulé“…. La métaphore est osée, on en conviendra, pour une chanson dont le titre initial devait être “Honey Pie”.  

Toujours est-il que le Mémorial s’intéresse donc à la pop culture en accueillant dans sa grande salle, au pied de la Butte du Lion, jusqu’au 18 mai 2024, une exposition consacrée au mythique groupe suédois, “From Waterloo to the World”. Une plongée dans son histoire, dont la carrière internationale doit beaucoup à cette victoire: 6 millions du disque “Waterloo” seront vendus, à travers le monde.

Pas sûr que le même succès aurait été au rendez-vous si le groupe avait d’emblée proposé la version suédoise, ni même la version française:

“Waterloo / Tu es vainqueur et j’ai peur de la guerre / Waterloo / Je me constitue ta prisonnière / Waterloo / Je ne peux plus fuir et plus t’échapper /Waterloo / Pour la vie je promets de t’aimer.”

Cette victoire valut, par la même occasion, une exposition aussi planétaire qu’inattendue à la commune brabançonne au Lion, bien au-delà de l’épisode historique connu. Alors, son premier magistrat était André Caussin, dernier maïeur socialiste de Waterloo. Quand on vous le disait que c’est déjà une histoire ancienne…

Mais ni la chanson d’ABBA, ni cette exposition n’auront pas été l’occasion de rétablir la vérité historique sur l’histoire vraie de la Bataille, alors qu’on voit ici que les choses auraient pu – et dû – être faites.

Et on ne sait quel serait le bouleversement le plus important, qui toucherait l’histoire de la pop, ou de la Grande Histoire, si Wellington n’avait pas ainsi nommé sa victoire, au seul motif que c’était le nom du hameau où il avait son Quartier Général – et qui sonnait, par un étonnant hasard, “anglais”. Car les combats n’ont pas lieu sur le territoire de la commune de Waterloo, mais un peu plus au sud, sur les territoires des communes actuelles de Lasne, de Genappe et surtout de Braine-l’Alleud, de toutes la plus meurtrie, la plus ensanglantée. Et c’est sur les terres brainoises qu’on trouve l’historique “Panorama” et le fameux lion… de Waterloo.

Que le “Mémorial 1815”, faisant l’économie de toute référence à Waterloo, soit sis Route du Lion, 1815 1420 Braine-l’Alleud n’est qu’une maigre réparation, et c’est toujours le Lion de Waterloo qu’on voit de loin et qu’on s’obstine à nommer ainsi, à tort.

Que dire de la révolution qui s’en serait suivie dans la géopolitique du Brabant wallon si les choses avaient été justement faites? Imaginerait-on encore qu’on prit un arrêté royal, le 3 mars 1914, accordant à Waterloo le blasonnement d‘argent à une pyramide tronquée de sinople sommée d’un lion, posé sur un

piédestal, la dextre appuyée un boulet, le tout de sable.

Et que la Commune de la tarte au sucre et des paveurs l’adapterait, ultime usurpation, en drapeau, en 2007. Il y avait là le ferment d’autres batailles, qui n’ont pas manqué…

Les choses étant ce qu’elles sont, laissons faire et fredonnons joyeusement “Waterlou”, sans entrer dans la bataille.

Mais on se rappellera aussi que cette année-là, l’ami Jacques Hustin avait offert une assez honorable 9° place à la Belgique, avec “Fleur de Liberté”. La liberté, qu’il chantait si bien, avec l’amour et la fraternité.

Jacques Hustin - fleur de liberté
Jacques Hustin – fleur de liberté

Il y a tant à faire et tant à aimer
Reviens sur la terre, fleur de liberté

Un joli message. A reprendre plus que jamais.

Bernard Chateau,


Accueil » Brighton, samedi 6 avril 1974: ABBA remporte le Concours Eurovision de la Chanson