On affirme, sans médire pour autant, que les braves gens de Namur ont hissé la lenteur à la hauteur d’une institution. A Carnières, c’est la naïveté qui est en cause, toujours très gentiment. Pourquoi ? L’histoire officielle de Carnières peut-elle répondre à cette question ?

Petite commune semi-industrielle de la région du Centre, Carnières, que “baigne” la Haine, immédiatement après avoir quitté son berceau planté au pied d’un terril d’Anderlues, a certes son histoire déjà mentionnée en 869 dans le polyptyque de l’Abbaye de Lobbes. Du latin ” carpitenum” – charmoie, lieu planté de charmes – (1). Carnières n’a pas eu, on vous l’assure, une vie remplie de charmes. On s’y est très souvent battu, et pas du tout de façon naïve.

En 1170, Godefroid II, duc de Brabant, voulut s’emparer du comté de Namur. Henri l’Aveugle demanda du secours à son beau-frère, Baudouin IV, comte de Hainaut. Cinq mille hommes de Flandre, Hainaut, du Namurois et du Luxembourg rencontrèrent ceux du Brabant à Carnières. Ce fut un horrible carnage. Le Brabant fut battu, et ravagé.
En 1185, le Brabant remit ça, avec les troupes de l’archevêque de Cologne.
En 1554, les régiments français détruisirent Carnières, avant d’anéantir Mariemont la jolie. En 1568 et en 1572, “amical” passage des Gueux. En 1622, l’armée de Mansfeld fait une petite visite de courtoisie. En août 1914, deux régiments français et allemand échangent des gros mots et le reste au hameau de Collarmont. Cela fait du vilain, et un cimetière militaire de plus. Et la libération de 1944 exige ses morts.
N’est-ce pas que toute cette sanglante histoire n’a rien de spécialement naïf, à moins que vous ne considériez qu’il soit naïf de “pour le roi de Prusse”.
Puisqu’il y a eu bataille sur bataille à Carnières, donc beaucoup de victimes, voilà sans doute la raison pourrait-on conclure à la légère, pour laquelle l’on nomme communément les Carniérois – et notamment ses joueurs de football – des “Rascourcis”, des diminués, des décapités? Ne serait-ce pas plutôt parce qu’au pilori qui exista longtemps sur l’actuelle place communale, trois bandits furent un “beau” jour, proprement décapités, “rascourcis” ? (2)
Ou bien – sautons d’emblée dans la légende – parce qu’au cours d’une manifestation, un drapeau trop haut pour passer à la verticale sous un pont fut proprement “rascourci” par le haut, au lieu d’être passé tout simplement en l’inclinant, de toute sa longueur, à l’horizontale ? Les plus méchants ajoutent même qu’un édile carniérois, furieux que l’on eût sectionné le haut du drapeau, fit entendre sa grosse voix parce que, selon lui, c était le bas du drapeau, et non le haut, qu’il eût fallu scier…

Nous y sommes, n’est-ce pas, en pleine naïveté. Tenez, ” il y avait une fois” un monceau de terre, sur la Place de Carnières. Il fallait le faire disparaître. Des ouvriers communaux s’appliquèrent donc à combler un trou existant. Mais, le trou comblé, il restait quand même un peu du monceau de terre. Survint un chef qui, disent les mauvaises langues, ordonna de “faire un trou à côté pour y mettre le reste de la terre”.

Mais la meilleure est sans doute la légende de l’Ours. Oyez plutôt. Avant celle qui devait être la dernière, un montreur d’ours était venu faire travailler deux de ces gentilles bestioles sur la foire installée à Carnières. Or, il advint qu’un des plantigrades choisit ce moment-là pour trépasser. Qu’à cela ne tint ! On dépiauta l’animal et on fit appel à un brave Carniérois – non pas l’idiot du village, mais plutôt un gars pas compliqué pour un liard, comme il y en a beaucoup de ce côté-là … On habilla notre homme de la peau d’ours et ce glorieux Carniérois, sans aucun souci du danger, joua le jeu avec une stupéfiante aisance. S’approchant du véritable ours, il lui demanda : “Eye vous, astè d’Carnières ètou ?” ( Etes-vous de Carnières, vous aussi ? )

Ceux qui rient le plus de toutes ces légendes naïves ( et des autres “histoires” qui naissent à chaque occasion, encore de nos jours), ce sont les Carniérois.

La légende de l’ours est une de ces histoires naïves qui a tellement frappé l’imagination que bien des Carniérois l’ont prise pour une réalité.

Certains cherchent à dater la ducasse où se serait déroulé cet épisode amusant; d’autres semblent savoir qui était l’homme assez naïf que pour prendre la place de l’ours.

Que l’on sache que tout ceci relève de l’imagination et du folklore.

Cette histoire de l’ours se raconte d’ailleurs dans d’autres lieux, à d’autres époques.

Mais Carnières s’en est tellement imprégnée que bien souvent on en parle, certains se déguisent en ours au Carnaval, des voisins en rient ou même, on a organisé des ducasses où l’on faisait venir un montreur d’ours.

Ainsi, dans les années 45-50, un cirque est venu s’installer sur la Place de Carnières avec… un ours; le forain a montré l’ours… Les spectateurs étaient nombreux sur le kiosque. D’ailleurs, pour mieux voir, tout le monde s’est mis du même côté et … le plancher du kiosque a cédé !

Il ne faut pas confondre cet accident avec celui survenu à Pâques 1930 au kiosque de Tout Vent.

Pour finir, souhaitons que longtemps encore, on parle de l’ours de Carnières car dans le village, on est fier de son passé, de ses légendes et de ses histoires naïves.

L’Histoire du kiosque écroulé ? Cela nous fait plaisir de savoir que nous sommes lus ! Gilbert Houtrelle (3) nous a écrit concernant l’histoire du kiosque écroulé en arguant que ce n’est pas à Tout Vent que cela s’est passé mais sur la Place de Carnières !

Nous venons de raconter l’accident survenu sur la Place de Carnières lors de la venue d’un ours.

Mais c’est bien aux Trieux, à Tout Vent, lors de la fête de Pâques en 1930, que l’autre affaissement s’est produit.

Des fêtes avaient été organisées pour fêter le Centenaire de l’Indépendance de la Belgique. La Chorale « Les Crampons » de Jolimont est alors venue se produire sur le kiosque qui s’est écroulé.

Henri Dassonville avait alors 14 ans; il chantait dans la chorale et s’en souvient !

Maurice Herlemont

A.M. Marré-Muls



(1) La toponymie préfère actuellement faire dériver le nom de Carnières du mot celte “Carn ou Cern” signifiant pierre terminé par le suffixe “ières” voulant dire lieu où abonde. Carnières est alors le lieu où abondent les pierres. Note de la Rédaction.
(2) Voir Feuillets Carniérois n° 33.

(3) Gilbert Houtrelle nous informe que son père y était; Mariette Houyoux, épouse René Ledoux, Olympe Bailly, épouse Roger Fumière et Yvette Cabron, épouse de Georges ont elles-aussi vécu la même mésaventure !



Histoire du kiosque écroulé

C’était dans les années mille neuf cent trente.
Il y avait à Carnières, un cercle de gymnastique dirigé par Monsieur Fraikin Il a organisé, sans doute lors de la ducasse de Pâques, une exhibition à Carnières-Trieux, au lieu-dit Tout Vent : les athlètes se produisaient sur une estrade au sol, la musique se trouvait sur le kiosque.
A un certain moment, le kiosque s’est effondré …les musiciens sont tombés…la panique s’est emparée de tous. Puis, tout le monde a ri, pensant en son for intérieur qi’il n’y a qu’à Carnières que de telles choses arrivent !


Le Cercle Apicole de Carnières

Petite note de Gonzales Decamps a attiré notre attention. « En 1898, on a fondé à Carnières, un cercle apicole. Le 22 juin 1908 on a célébré le 10° anniversaire de la création du Cercle Horticole et Apicole de Carnières par un banquet à souscription chez Mr Augustin Gaillet, Grand Place ».

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