Métier apparu au milieu du 19e siècle et qu’il est intéressant d’apprendre à connaître.

En 1835, on installe la première ligne de chemin de fer en Belgique, entre Malines et Bruxelles et il va de soi qu’il faut instaurer la surveillance des passages à niveau.

Qui étaient les gardes-barrière ?
Le métier était exercé par des hommes ou par des femmes, à égalité de nombre; la femme, souvent épouse de cheminot, travaillait 14h par jour et n’était relayée par son mari que le soir et la nuit. En France, on choisissait souvent les invalides de guerre. Après 1914, les femmes et les enfants ne peuvent plus travailler entre 22h et 6h du matin et après la loi des 8h de travail, la garde-barrière est remplacée par une suppléante, qui s’installe dans la loge. Le métier de garde-barrière était à haute responsabilité car il fallait interdire aux usagers de la route et aux piétons de traverser le passage à niveau à l’approche d’un train. Ceci par tous les temps et parfois sous les injures des mécontents, surtout lorsque le train avait du retard! Il arrivait au responsable du passage à niveau, de sauver la vie d’imprudents ou de suicidaires, parfois au péril de leur propre vie. Il ne pouvait se permettre la moindre erreur ni un moment d’inattention. Le règlement était d’ailleurs

explicite à ce sujet : le garde-barrière devait être constamment sur le qui-vive, réagir avec détermination au moindre ennui, ne pas quitter sa loge… Des sanctions étaient prévues en cas de manquements : la révocation pure et simple en cas d’absence au travail, d’assoupissement ou d’oubli de fermer les barrières. Une retenue sur salaire punissait une arrivée tardive à son poste ou toute distraction par un tiers par exemple.

En 1926, la S.N.C.B. est fondée et c’est elle qui va recruter les gardes-barrière : ils devaient passer une visite médicale, savoir lire un texte et réaliser des opérations fondamentales en mathématique. Elle mettait gratuitement à la disposition du garde-barrière, en échange de ses prestations, une maisonnette pour abriter sa famille, tout près du passage à niveau. Une loge, proche de la maisonnette, était meublée rudimentairement : une table, une chaise mais pas de lit et un poêle qui ne devait pas trop chauffer, pour éviter tout assoupissement.

A Carnières, Alphonsine Willame née à Carnières en 1905, était l’épouse de Pierre Pierquin, houilleur, né à Chapelle-lez-Herlaimont en 1904. Celui-ci mourut jeune, en 1944 et sa femme a donc dû trouver un travail lui permettant de vivre et d’élever sa fille unique, Georgine. Elle fut garde-barrière, d’abord à la Chaussée Brunehault, le PN3, avec une loge, près de la chapelle du Saint Sang car elle habitait au fond d’une ruelle donnant sur la Chaussée Brunehault, puis, au PN6, le passage à niveau de la rue Beauregard dont on peut encore voir la loge. Ces deux passages à niveau, tout comme le

PN4 de la rue Solvay et le PN5 de la rue de la Station étaient situés le long de la ligne 112 Haine-Saint-Pierre – Marchienne-au-Pont. Son médecin traitant se souvient qu’elle avait une tuméfaction calcifiée au sein, suite à ses nombreux tours de manivelle…

Quelles sont les sortes de passages à niveau ?

Ceux dont les barrières sont ordinairement ouvertes et se ferment évidemment au passage du train et ceux, toujours fermés, et ne s’ouvrant qu’à la demande d’un usager de la route. En Belgique, en 1890, il y avait 5.105 passages à niveau dont 2.205 non gardés. Les barrières sont de différents types: à palissade, à vantaux ou coulissantes (fig.2), les plus cou-rantes, s’ouvrant horizontalement, actionnées par une manivelle que les femmes pouvaient manier assez facilement. Dans un premier temps, le garde-barrière bloquait la traversée pour le charroi, laissant un petit espace libre pour les piétons et puis, dans un deuxième temps, fermait complètement le passage à niveau.

Les premiers gardes-barrière n’avaient que peu de moyens d’être prévenus de l’arrivée d’un train : ils connaissaient seulement les heures de passage des trains. Un cornet et des drapeaux permettaient d’avertir le train et le public d’un danger quelconque. Au 19e siècle, les accidents étaient cependant peu nombreux en raison du trafic réduit et des faibles vitesses des usagers de la route, se déplaçant souvent à l’aide de la traction animale. Après l’installation du téléphone et des postes de signalisation, fin 19e siècle, le travail était plus sécurisé. En début de journée, le signaleur et le garde-barrière réglaient leur montre afin d’arriver à une bonne synchronisation. Le garde-barrière disposait de documents écrits, dont un carnet signalant le n° du train et l’heure de son passage. Le téléphone annonçait l’arrivée du train et le garde-barrière Fig. 1 devait donc immédiatement faire évacuer la voie et fermer les barrières. Il signalait aussi toute anomalie concernant le train.

Au début des années 1960, les passages à niveau sont automatisés, des ponts et des tunnels sont construits. Le métier de garde-barrière disparaît ; enfin, presque ! Il en reste encore quelques-uns employés lors de défaillances électriques.
Le 1er janvier 2017: 1l y a encore 1773 passages à niveau.
Le 1er janvier 2018: 1l y a encore 1713 passages à niveau.
Aujourd’hui, il y en a encore moins !


A.-M. Marré-Muls

Merci à André Biaumet, ingénieur civil aux Chemins de fer belges, pour sa relecture de l’article et l’ajout de certains renseignements.
Merci à Daniel Léonard, arrière-petit-fils d’Alphonsine Willame. Michel Marin, Histoire des Chemins de Fer en Belgique

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