Au 14e siècle, les fonctions des bureaux du CPAS actuels étaient dévolus au corps échevinal et au pasteur. Les revenus dont ils disposaient pour l’assistance des pauvres prenaient le nom de « Table commune des Pauvres ». Un fonctionnaire appelé « mambourg des pauvres » était préposé à la recette de ces biens; ses fonctions étaient annuelles et parfois bisannuelles. Il rendait son compte, comme celui de l’église, aux bailli, pasteur et échevins et recevait pour cet office une certaine rémunération.
Pendant longtemps, la mambournie se passe par adjudication, c’est ce qui explique pourquoi l’on rencontre souvent des mambourgs illettrés.
Un document de 1664 nous renseigne que la Table des Pauvres possédait alors 7 bonniers (1) et demi de terres loués en 15 portions en sus de certains biens à Haulchin. Un chassereau (2) de 1682 consigne que les recettes étaient constituées par des rentes ou arrérages de différentes natures et par la récolte des grains.
Les dépenses se divisaient principalement en grains distribués, en argent, en vêtements, en subside d’écolage pour les « escoliers pauvres », en l’octroi de cer-cueils, paiement de chirurgien et répartition de « bottes de fer pour apprendre le métier de cloutier ».

En 1787, la Table des pauvres possédait douze bonniers de terres labourables et un bonnier de prés, le tout loué pour 452 livres et 17 sous. Avec les rentes en argent et en grains, elle se constituait un revenu total de 709 livres environ mais elle avait des charges évaluées à 421 livres.
Les revenus étaient distribués aux pauvres sur billets signés du pasteur ou du mayeur. Ces distributions étaient presque toujours en nature ainsi que cela existait déjà un siècle auparavant.


La Révolution française amena la chute de cette institution qui fut transformée en Bureau de Bienfaisance et fut organisée à peu près comme elle l’était encore début 20° siècle.

Depuis le 26 septembre 1925, le Bureau de Bienfaisance se dénomme à Car-nières, Commission d’Assistance Publique (CAP). Ses recettes étaient alors constituées par les recettes provenant de la location d’immeubles; elles étaient parfois augmentées par des donations exceptionnelles qui provenaient principalement du bénéfice de certaines fêtes.
Le budget de 1929 comprenait une recette de 64.228,75 francs et une dépense du même import.

Depuis 1976, les CAP sont dénommés CPAS c’est-à-dire, Centres publics d’aide sociale. Le minimex est appelé revenu d’intégration sociale.
Tout CPAS a pour mission de permettre à toute personne de mener une vie conforme à la dignité humaine (art. 23 de la Constitution belge). Son action consiste en deux prestations :
– le droit d’intégration sociale par l’octroi d’un emploi et/ou d’un revenu d’intégration, assorti ou non d’un projet individualisé d’intégration sociale ;
– l’aide sociale au sens large du terme, soit par :
– une aide matérielle (tant financière qu’en nature)
– un soutien psycho-médico-social (tels que la guidance budgétaire, le conseil juridique, l’accès à la culture, etc…).
Chaque CPAS détermine, après enquête sociale, l’aide la plus adéquate à accorder en fonction des besoins insatisfaits à titre personnel et familial.
Le droit à l’intégration sociale doit être considéré comme un système de sécurité sociale résiduaire. Il ne s’adresse qu’aux personnes et aux familles dans l’incapacité de se procurer des ressources par d’autres moyens ou exclues du système de sécurité sociale hors les cas d’équité
Les revenus actuels des CPAS sont issus du budget Communal, de subsides de projets et de locations de maisons ou de terrains.


A côté de la Table des Pauvres, fondée pour l’utilité générale des habitants de la communauté, existait à Carnières, une ou peut-être deux institutions spéciales dont le but était d’apporter soulagement aux malades.
On mentionne au 15° siècle la maladrerie à Carnières: elle était située en dehors de l’agglomération, dans une campagne qui a conservé le nom de Champ de la Maladrée et qui constitue le versant nord de la colline des Martias. Dédiée à Saint-Lazare, elle servait probablement de léproserie et d’hôpital pour les personnes atteintes de la peste. Cette terrible maladie exerça plusieurs fois ses ravages dans le village.
Nous ne possédons aucun document se rapportant à la durée de cette institution et à l’importance de ses revenus. Peut-être ceux-ci furent ils ajoutés à ceux de la Table des Pauvres, à ceux de l’Hôpital de Colarmont ou bien encore, ont-ils servi à doter l’hôpital royal (Hôpital militaire de Mons).

L’Hôpital de Colarmont était très ancien. Dès 1293, il est mentionné sous le nom de Hostellerie de Carnières. Au 17e siècle, on ignorait la date de sa fondation et les noms de ses fondateurs et bienfaiteurs. Ces derniers cependant semblent avoir été les anciens seigneurs. L’Hôpital en effet, était compris dans le fief de Car-nières et relevait de Strépy comme le fond de la seigneurie. Il y existait, dès 1502, un bénéfice ecclésiastique dont le seigneur était collecteur. Il comprenait la fondation de deux messes, la semaine, à perpétuité.
Au 14ª siècle, il possédait une dotation spéciale et notamment la dîme sur certains héritages de Carnières. En 1748 ces héritages formaient une manse (3) de 23 bonniers de terres labourables et de 9 bonniers de prairies (dimage de Saint Nicolas). Cette dîme était perçue par le seigneur ; le curé possédait néanmoins la menue dîme excepté celle des pommes, des houblons et des foins.
L’Hôpital, dédié à Saint Nicolas, se trouvait au hameau de Collarmont, près . du vieux chemin de Namur.

Au 15e siècle, une chapelle ayant également pour patron Saint Nicolas servait aux besoins religieux des habitants de l’Hôpital; elle était dotée de biens et formait un bénéfice dont le seigneur avait la collation et qu’il attribuait quelquefois à un prêtre particulier, le plus souvent, au curé de la paroisse. Plus tard, semble-t-il, on n’y disait plus la messe que tous les quinze jours à la rétribution de 6 patars chacune.
Au milieu du 18e siècle, la chapelle ayant été détruite, à la suite de circonstances que nous ignorons, le curé affirmait qu’on se déchargeait plud ou moins dans la paroisse puisque la dite chapelle avait toujours eu pour sa plus proche, l’église-mère.

Il semble que dès le milieu du 15e siècle, les fonds affectés aux soins à donner aux malades, n’étaient plus soumis rigoureusement à cette affectation, probablement parce que cet établissement créé pour une population nombreuse, n’avait plus autant de raison d’être lorsque celle-ci se trouve décimée par les guerres, les pillages et la peste.

En 1532, le 4 mars, Baudouin, seigneur de Carnières, « arrentait héritablement l’hôpital et propriété que l’on dit l’hôpital de Colarmont, gisant au dit Car-nières contenant 6 bonniers tenant au chemin de Namur, à Piérart des Hayes, Bruno, à Abraham Corpsvaillant, à Adrien Philippe et au dit seigneur de Car-nières, de deux côtés ».

En 1575, les biens de l’hôpital étaient affermés à Jean le Keux pour la somme de 36 livres. Cet établissement se composait alors d’une maison, grange, étable, d’un jardin à porée, pré, vergers et terres labourables. A côté existait un four banal où tous les habitants pouvaient aller faire cuire leur pain, moyennant une minime rétribution pour le seigneur.

En 1668, ils étaient occupés par le fermier de la ferme de la Basse-Cour, Jean de Mons qui, le 28 décembre de cette année les sous loua pour trois ans à Vincent Le Cordier moyennant un fermage de 16 livres « et sous certaines conditions d’entretenir la maison et le four et de veiller aux bestes que le fermier mettrait champier sur les trieux voisins de Colarmont » ; Il devait en outre nourrir les bestiaux et les entretenir dans les étables de l’hôpital.

Un édit de Philippe de France, duc d’Anjou et roi d’Espagne du 30 juillet 1703 voulut comprendre les biens de l’Hôpital de Carnières pour les affecter à la dotation de l’Hôpital Royal de Mons mais cette mesure n’eut paraît-il aucune effet, les bailli, mayeur et échevins du lieu, ayant prétendu qu’ils n’avaient plus connaissance des fondations faites pour soigner les malades. Au milieu du 18e siècle, la chapelle ayant été détruite, à la suite de circonstances que nous ignorons, le curé affirmait qu’on se déchargeait plus ou moins dans la paroisse puisque la dite chapelle avait toujours eu pour sa plus proche, l’église-mère.

En 1791, le dîmage de l’Hôpital était tenu à ferme par le sieur J.J. Wilputte fermier à Carnières, qui percevait onze gerbes pour cent.

De l’antique Hôpital de Carnières, il ne reste plus rien…que le souvenir !

A.M.Marré-Muls A partir de documents de José Decamps.


(1) Bonnier = environ 1 hectare.
(2) Chassereau = ensemble de documents anciens officiels (par ex. droit public, bienfaisance etc…).
(3) Manse = tenure.

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