La culture du houblon dans la commune de Carnières est mentionnée pour la première fois dans un relevé datant de 1701 « Seize houblonnières ayant ensemble 1375 à 1400 fosses ». Les fosses comprenaient 3 à 7 perches. On se bornait semble-t-il à laisser pousser un houblon sauvage. Ce n’est qu’après 1830 que la culture s’améliora et prit une réelle importance. D’après les dires d’anciens marchands de houblon, la production de Carnières jouissait d’une renommée égale à celle des meilleurs houblons d’Havré, de Buvrinnes et d’Anderlues. Les prix étaient rémunérateurs en certaines années mais très bas en d’autres. François Dartevelde, important houblonnier à Carnières a noté les prix suivants sans toutefois préciser la quantité : 1832, 11 sous ; 1833, 9 sous et demi ; 1834, six sous et cinq sous moins un liard; 1835, 5 sous et demi; 1836, 3 sous et demi; 1837, 4 sous; 1843, 15 liards; 1844, 4 sous ; 1845, 7 sous; 1848, 22 centimes; 1852, 50 centimes.

La récolte du houblon donnait lieu à certains usages qui relevaient du folklore. G. Decamps rapporte : « Quant le houblon était mûr, on coupait la plante au pied, on arrachait la perche à la main ou avec une espèce de levier (tire-pierses). Avec la main, on poussait du bas vers le haut les tiges (ou cordes) de manière à ne pas abîmer les cônes (fleurs) et on le portait vers un local ou avait lieu l’a espiage » opération qui se faisait soit sur l’aire d’une grange, soit dans une place de la maison. Les « spieurs » ou les « spieuses » — les femmes et les jeunes filles dominaient — étaient assis en ligne et cueillaient « les cloquettes » (fleurs) qu’ils jetaient à côté d’eux sur un « mont» que l’on nettoyait ensuite des feuilles qui s’étaient mélangées à la récolte. C’était faire le tri ou ” baillet ».

L’espiage se faisait sans grands frais car tous les voisins et voisines s’y employaient. Ils accouraient à l’espiage comme à une fête, quand on avait dit « on espie chez un tel » car de commun accord, on établissait une sorte de rôle d’espiage dans les habitations de tel hameau. Cette opération se faisait d’ordinaire le soir à la lueur d’un crochet appendu au mur.

Inutile de dire que dans cette assemblée on était loin de garder le silence; on y parlait de tout, des événements du village, et y défilait la chronique scandaleuse du lieu. La ménagère faisait distribuer de grandes jattes de café et des gouttes de genièvre pour les hommes. A une heure avancée de la nuit, on retournait chez soi, s’éclairant d’une lanterne. Rien n’était plus curieux que d’apercevoir dans la nuit les points lumineux des falots perçant de tous côtés les ténèbres d’une nuit noire.

Le houblon « spillé » était porté au séchoir (toreilles) que quelques cultivateurs plus importants avaient installés, Le houblon attendait alors sur les greniers le moment de la vertur. Les marchands de houblon bien connus à Carnières étaient les Dezomberghe, les Fauconnier-Decamp et les Château.

A.T.
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