Le Carnaval de Carnières serait apparu vers 1860.

D’après un texte écrit par Gonzales Decamps en 1909 dans le Journal de Mons, il y aurait eu un Carnaval dès 1840 à Carnières mais d’après Samuel Glotz, comme aucun fait matériel n’est venu confirmer cette date et qu’il n’y a qu’un témoignage, il faut rester sceptique et porter à 1860, le début supposé du Carnaval à Carnières 2 !

Les premiers documents écrits remontent à 1891 lorsqu’apparaît dans une délibération de Conseil Communal, un point consacré au Carnaval® et en 1894, lorsque le Conseil Communal fixe l’ordre du cortège du Carnaval du 4 mars: il y a déjà 7 sociétés de Gilles !

Patigny, Francq, Duhait (qui dirigeait les Marins), Etienne, Dubuisson, Gourgue et Magnies; ce sont donc les noms des exploitants des cafés où les Gilles avaient leur local…

L’affiche annonçant le Carnaval du 24 mars 1895 précise l’itinéraire du cortège qui ne variera pas jusqu’en 1971: départ de la Gare, rue Royale, rue du Calvaire (= rue Solvay), rue Nonette (= rue E.Vandervelde), rue Miclet (= rue Bughin), rue Neuve (= rue Duvivier) et Place. Il y avait alors des Gilles, des Paysans, des Marins, Grands-Pères, Grands-Mères,…, Pierrots, Clowns, Mousquetaires, Mélangés et groupes variés. Il y est écrit aussi que les costumes inconvenants ne pourront pas prendre part au cortege.

Il y avait de nombreux bals parés, masqués et travestis dans tous les « salons »* de la localité, un immense feu de joie et un rondeau général.

En 1896, il y a en plus, des Cavaliers et des chars. Les années suivantes, les délibérations de Conseil Communal décrivent encore l’ordre du cortege.

Et bien sûr, des subsides et des primes sont accordés par l’Administration Communale et par Mariemont dès 1895 et sans doute auparavant.

Mais au 20e siècle, il y eut des interruptions dans les Carnavals :
– De 1915 à 1920: 1º Guerre Mondiale
– De 1932 à 1934: récession économique et grèves
– De 1940 à 1945: seconde Guerre Mondiale

En 1946, le Carnaval connaît une renaissance digne d’être contée car si les autorités communales avaient estimé ne pas rétablir le Carnaval, un comité des fêtes, présidé par l’échevin Debaix forma en un temps record (2 semaines) une société de Gilles qui, avec l’aide des commerçants et de cotisations volontaires permirent à Paul Masy, alors secrétaire communal et Gille dans l’âme de recréer l’ambiance du Carnaval qui depuis lors, n’a plus cessé d’exister.

Il est intéressant de se pencher un peu sur l’évolution du costume de Gille.

A l’origine, le Gille ne se distinguait pas des autres masques qui célèbrent la fin de l’hiver et ce rituel se déroulait aussi bien en Belgique qu’en France, en Allemagne, en Autriche, en Suisse, en Roumanie, en Italie ou en Espagne. C’est au cours de la 2e partie du 19e siècle (après 1850), que le costume du Gille se précise et ressemble de plus en plus à celui d’aujourd’hui.

Au départ, c’étaient les femmes des Gilles qui confectionnaient les costumes avec une base commune mais de la fantaisie dans les décorations. Si le costume était toujours de toile bis assez grossière, les ornements variaient selon le goût des couturières. Avant 1900, le costume de Gille était dégarni, dès la fin du carnaval, teint et transformé en solide bleu de travail donc en « balot », par les épouses de Gilles…

évolution du costume de gilles
évolution du costume de gilles

Les sabots étaient souvent en peuplier ou en saule et sur le dessus, on fixait des fleurettes d’étoffe blanche qu’on appelait les « renoms ». Anciennement, les sabots étaient souvent décorés de motifs sculptés ou peints et le sabot se terminait par une pointe recourbée comme une corne.

L’apertintaille ou tour de clochettes, faite d’un rembourrage en laine fermé par une boucle en cuir, a elle aussi évolué au cours des temps. Avant 1914, l’apertin-taille avait une hauteur de 19 cm environ; il y avait deux boucles en cuivre et deux rangées de sonnettes en cuivre de même hauteur; elles étaient fabriquées par les Gilles eux-mêmes. Dans les années 20, le rembourrage n’a plus qu’une hauteur de 9 cm et il est bleu et blanc avec une seule boucle en cuivre. De nos jours, même rembourrage de 9 cm, couleurs rouge et jaune, une boucle en cuir et 7 sonnettes de tailles différentes.

Le panier en osier d’aujourd’hui était anciennement, un panier à salade en fil de fer.

Quant au chapeau, il s’est transformé au cours des ans. Au départ, on utilisait des coiffes en carton garnies de papier, sur lesquelles on piquait des baguettes de bois entourées de papier de couleur coupé à franges (6).

le ramponneau
le ramponneau

A Carnières, on se souvient que les femmes de Gilles confectionnaient elles-mêmes les chapeaux et les ornaient de toutes sortes de plumes, entre autres, des plumes de coq.

On trouve ensuite le shako recouvert de velours grenat, avec bord relevé latéralement, orné de galons de couleurs vives et d’une ou plusieurs plumes de marabout ou d’autruche; c’est le ramponneau. La structure était métallique, en forme de grès ou de terre cuite pour faire le café. En wallon, on appelait ce filtre à café, le ramponneau…




A.M. Marré-Muls

(1) Extrait du livret consacré au « Carnaval de Carnières » édité en janvier 2016, par A.M.Marré-Muls.
(2) S. GLOTZ, De Marie de Hongrie aux Gilles de Binche. Une double réalité historique et mythique, dans Les Cahiers Binchois, Binche, 1995, p. 227, note 212.
(3) Nous tenons à féliciter la persévérance de Christian ARNOULD dans la recherche de documents aux AEM.
(4) Un salon est un café où l’on danse.
(5) On suppose la Société Charbonnière de Mariemont !
(6) G. PLACE, Le Carnaval du Feureu, p. 34.

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