La ferme de l’Hosté a été construite après 1554, sur et avec les ruines de l’ancien château des seigneurs de Carnières.

Le premier seigneur de Carnières, Morand, s’établit dans le village dès le début du 12e siècle. Il y fit probablement bâtir un donjon afin d’y loger avec ses hommes d’armes. Ce fut l’origine du château qui s’agrandit au cours des siècles et devint un hostel ou une hôtellerie, une véritable ferme aussi, avec four et moulin banal.

La description la plus ancienne date de 1503, lorsque Warnier de Carnières établit son testament en faveur de son fils Baudouin; il parle “d’un fief comprenant une maison manable, thour, forteresse, grange, estables, marescauchie, colombier, court, bassecourt, courtil, gardin, estre et entrepresure3…

Le 18 septembre 1544, signature de la paix de Crépy, qui a mis fin à de longues années de guerre entre l’empereur Charles Quint et le roi de France, Francois 1er. Mais celui-ci meurt en 1547 et son fils, Henri II, époux de Catherine de Médicis, mène une politique de “guerre froide” dès les premiers jours de son règne. Il hait Charles Quint qui comprend qu’il devra reprendre les armes contre son voisin de France. Les hostilités entre le roi de France et l’Empereur reprennent dès 1551. C’est la guerre aux Pays-Bas en 1552 et 1553; il y eut alors beaucoup de destructions en Hainaut, amenant le territoire vers un état de désolation et de pauvreté.

En 1552, les troupes du comte de Croÿ (1) brûlent le château de plaisance d’Henri II à Folembray (dans l’Aisne) (2). Certains érudits ont considéré cet événement comme étant la principale, voire l’unique cause de l’attitude adoptée par l’armée royale dans le comté de Hainaut en juillet 1554.

Il y eut la campagne de Picardie et différentes autres campagnes militaires françaises et impériales.

Pour J.M. Cauchies (3), “1554 fut une année funeste, année de malheur, année de guerre. Et qui plus est, de guerre sauvage, d’une campagne destinée à semer la terreur plutôt qu’à atteindre des objectifs proprement militaires, stratégiques…”.

Le 22 juillet 1554, le château des seigneurs de Carnières est démoli par une division de l’armée française conduite par le lieutenant de la Compagnie du duc de Nevers et deux jours plus tard, Carnières voit s installer sur son ter-ritoire, le campement des troupes impériales de Charles Quint. On se sert des matériaux du château pour édifier des maisons particulières mais aussi des fermes comme la ferme de l’Hosté et du Bailois et pour paver des chemins.

Toute la prévôté de Binche a été la circonscription qui a le plus souffert de la campagne militaire de 1554.

Un écrit du dernier seigneur de Carnières, Loys, nous apprend qu’en 1560, il était dans l’ennui car “il heu sa maison et forteresse dudit Carnières avecq le bassecourt et sa maison de censse aussi bruslée…”. Il continuera à se loger “petittement” dans les ruines. Etant le dernier seigneur de Carnières, car il n’eut qu’une fille, le lieu fut abandonné comme logement des seigneurs de Carnières.

L'ancien château de Carnières, vers 1865
L’ancien château de Carnières, vers 1865

Un texte de 1607 dit: “Richard du Vivier mayeur de Carnières; Laurent du Four lequel tient à cense le parfaict du bail Hilaire Scarmure de la maison de cense… condit la Bassecourt”. En effet, Gonzales Decamps parle dans un manuscrit de ferme de la Bassecourt ou de l’Hôtel. Il est donc certain que ce qu on appelle ferme de la Bassecourt ait aussi appartenu au seigneur de Carnières. A front de Place, les bâtiments sont visibles sur les Cartes des Chasses de Mariemont et de Ferraris (1770). On y trouvait sans doute les écuries (4) mais aussi une bergerie, des étables, une grange et une maison. Jusqu’à la Révolution Française, les seigneurs venaient loger quelques jours dans l’ancien castia, sans doute afin de toucher leur loyer ou parce que pour eux, c’était une maison de campagne. C’est la partie droite (quand on est face du bâtiment) qui était alors occupée et on appelait cette aile “le quartier du seigneur ou du marquis”.

On sait aussi que les fermes de l’Hôtel et de la Bassecourt furent vendues comme biens d’émigrés à DAULMERIE Frères de Fontaine l’Evêque après la Révolution Française.

Un plan explicatif de G. Decamps à partir du plan Popp, montre que le terrain SnD146 appartenait encore, fin 19e siècle à DAULMERIE. On peut supposer que les différentes propriétés cadastrées de SnD 150 à 156 appartenaient au même propriétaire qui les a changées en maisons particulières.

Quant à la ferme de l’Hosté, elle a été convertie vers 1876-77 en maisons particulières. On raconte que l’ancien pont-levis du château se trouvait au milieu, là où en 1911 on a construit une maison (celle de l’architecte André Buisseret).

DESCRIPTION ET ESTHETIQUE

On ne peut que s’en référer aux illustrations jointes au présent texte ainsi qu’au texte établi par le Patrimoine Monumental de Belgique (5). Place de Carnières, nos 8, 9, 10 : Immeuble du 16 ou 17e siècle profondément transformé depuis le 19e siècle “Sous haute bâtière d’éternit à coyau et frise den-tée, deux niveaux jadis de type traditionnel conservant en façade, deux arcs de décharge à l’étage du n° 9, un reste de chaîne d’angle au n° 8 et des ancres en S.” En 2013, la façade de la dernière maison de droite a été refaite. On a enlevé le “parement” extérieur, relevant ainsi les murs d’origine avec le chaînage en pierre, heureusement conservé apparent. (5) Le patrimoine Monumental de la Belgique. Wallonie, volume 10. Province du Hainaut. Arrondissement de Thuin, tome 2 F-T p. 627 + illustrations.

On suppose que, comme souvent au Moyen Age, la base, voire tout le donjon était fait de moellons; le château qui fut édifié après le donjon était probablement fait de moellons, de pierres taillées (aux angles certainement), de bois et de chaux comme on peut le voir à Guédelon (6). Des documents du commencement du 16e siècle mentionnent l’existence à Carnières de carrières assez importantes sans doute puisqu’elles fourniront de 1548 à 1622, la presque totalité des moellons qui servirent à la construction du château de Mariemont. En 1610-1611 (7), on lit que les châteaux de Binche et de Mariemont se fournissent en pierres de roches et de carreaux à Carnières. Il y eut à Carnières, différentes sortes de carrières: grès mamelonnés, schistes houillers et masses de cailloux concrétionnés, caverneux, de couleur grisâtre avec des filets ressemblant à du carbonate de chaux (8).

ENVIRONNEMENT

Quant à l’environnement, on ne sait que peu de choses. Par exemple qu’au 16e siècle, il y avait à peu près 62 bonniers de terres labourables (environ 62 ha) et 8 bonniers de prés 9). Nous venons d’étudier le château et la ferme de l’Hosté qui se trouvaient Place de Carnières, côté est, c’est-à-dire entre la rue St. Eloi et la ruelle qui va à l’école et au terrain de football. pas de demeures particulières, rien que le château… A.M. Marré-Muls (6) Le château de Guédelon (dans l’Yonne, en Bourgogne) est un chantier médiéval de construction historique d’un château-fort, débuté en 1997 selon les techniques et les matérieux utilisés au Moyen Age. (7) Comptes du domaine de Binche 1610-1611. (8) A.M. Marré-Muls, Carrières de Carnières, dans les feuillets Carnièrois n° 68, novembre 1989. (9) Selon Gonzales Decamps.

A.M. Marré-Muls



(1) Ami et conseiller intime de Charles Quint.

(2) Henri II, grand amateur de chasse, aimait se rendre au château de Folembray afin de chasser dans la forêt voisine. Il faut noter que ce château n’était que partiellement détruit et il a d’ailleurs servi aux rois de France jusqu’à Louis XIV qui le fit démolir.

(3) FEDERINOV Bertrand, La campagne du roi de France Henri II dans le comté de Hainaut en 1554, Hannonia, 2066, 589 p.

(4) D’après DAUZAT A., Dictionnaire étymologique des noms de famille et prénoms de France, Paris 1980 et DAUZAT A., Les noms de lieux, Paris, 1926, du 13e au 17e siècle, la basse-cour était la cour des écuries.

(5) le patrimoine Monumental de la Belgique. Wallonie, volume 10; Province du Hainaut. Arrpndissement de Thuin, Tome F-T p 627 + illustrations

(6) Le château de Guédelon (dans l’Yonne, en Bourgogne) est un chantier médiéval de construction historique d’un château-fort, débuté en 1997 selon les techniques et les matérieux utilisés au Moyen Age.

(7) Comptes du domaine de Binche 1610-1611.

(8) A.M. Marré-Muls, Carrières de Carnières, dans les feuillets Carnièrois n° 68, novembre 1989.

(9) Selon Gonzales Decamps.


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