En Italie, Lidia Poët
Sur Netflix, il n’y a guère, «Lidia fait sa loi», autour de la première femme avocate d’Italie. Née le 26 août 1855, Lidia Poët manifeste un esprit fort. Etudiante brillante, enseignante, elle s’inscrit en droit à l’Université de Turin. Sa thèse: «la condition de la femme dans la société». Inscrite à l’Ordre, par huit voix pour contre quatre, à 28 ans, elle est la première avocate italienne. Une décision disputée et annulée. Une longue bataille, qu’elle gagnera. Morte célibataire et sans enfant, le 25 février 1949 son épigraphe: “première avocate d’Italie”.
Devant le succès d’une ampleur inattendue, en juin 2023 , la série est renouvelée pour une deuxième saison, prévue pour cette année.
En Belgique, Marie Popelin
Le parcours de Lidia Poët rappelle celui de Marie Popelin, née en 1846 à Schaerbeek et morte en 1913 à Ixelles. Mais, elle, elle démontrera qu’il ne suffit d’avoir le diplôme: elle ne sera jamais avocate.
L’une et l’autre rappellent, en cette journée de la femme, qu’être une femme libérée, tu sais, c’est pas si facile…
Première belge docteure en droit, Marie Popelin obtient son diplôme à l’ULB le 12 juillet 1888, après avoir enseigné, à Gatti de Gammont, et à l’École moyenne de Mons. Dans la foulée, elle veut prêter le serment d’avocat. Et plaide qu’aucune disposition législative n’interdit l’accès des femmes aux professions juridiques. Mais pour la Cour d’Appel, il n’y a jamais eu de femmes, avocat. Et la loi de 1810 sur l’ordre des avocats n’évoque pas
l’exercice de la profession par des femmes. Donc: les femmes ne peuvent faire partie de l’Ordre; et puis, il ya le statut d’incapacité juridique de la
femme. Mais aussi: «la nature particulière de la femme, la faiblesse relative de sa constitution, la réserve inhérente à son sexe, la protection qui lui est nécessaire, sa mission spéciale dans l’humanité, les exigences et les sujétions de la maternité, l’éducation qu’elle doit à ses enfants, la direction du ménage et du foyer domestique confiée à ses soins la placent dans des conditions peu conciliables avec les devoirs de la profession d’avocat et ne lui donnent ni les loisirs, ni la force, ni les aptitudes nécessaires aux luttes et aux fatigues du barreau».
La Cassation confirmera l’Appel.
Marie avait obtenu son diplôme de droit à 42 ans, célibataire et sans enfant.
Elle travaillera dans un cabinet d’avocat, à constituer les dossiers, sans jamais plaider. Avec sa sœur, elle portera la lutte pour l’émancipation des femmes, créant la Ligue belge des droits des femmes. Elle explique: «la femme est autre chose qu’épouse et mère, elle peut aussi avoir des aptitudes spéciales qu’elle doit avoir le droit d’appliquer. Elle a le droit au respect et ne peut être considérée comme satellite de l’homme».
Une évolution lente. Et un Ordre obstiné.
Il faudra attendre 1922 pour que les femmes accèdent au métier d’avocat et 1948, à la magistrature.
En 2011, pour les 100 ans de la Journée internationale des femmes, des avocats ont demandé au Conseil de l’Ordre de lui accorder le titre d’avocate à titre posthume. Il s’y refusera. Motif: ce statut est lié à la prestation du serment… N’est pire sourd qui ne veut entendre: si elle avait prêté serment, la démarche pour lui voir octroyer le titre d’avocate à titre posthume n’aurait eu aucun sens… Ce dont il était question, c’était une juste demande en réparation d’une iniquité manifeste.
Le 16 décembre 2010, un Doodlee célébrait son 174° anniversaire…
Bernard Chateau,