Un membre de notre Cercle, J. Philippe, a préparé le relevé de tous les débits de boissons alcoolisées qui existaient à Carnières entre 1900 et 1940.

Afin d’introduire le sujet, nous présentons ci-après, une petite étude relative à ces mêmes débits de boissons et de suite, nous faisons remarquer le nombre étonnamment élevé de cafés : selon J. Philippe il y en aurait eu 265 entre 1900 et 1940 !

Ce chiffre élevé est malheureusement trop significatif : il rappelle les conditions de vie misérables du monde ouvrier de l’époque et surtout l’alcoolisme qui touchait aussi bien les femmes et les enfants que les hommes. Nous passons sur le cortège de misères consécutives à cette triste maladie, puisque ce n’est pas le but de notre travail.

En consultant les délibérations du Conseil Communal de Carnières, on suivra l’évolution des taxations sur les débits de boissons, mais en filigrane, on pourra surtout noter le nombre d’établissements où on servait à boire.

En 1883, la commune de Carnières fut autorisée par un arrêté royal du 24 août 1883 à percevoir des taxes : de 5 F sur les pigeonniers, de 5 F sur les voitures suspen-dues, de 5 F sur les bals et de 2 F sur chaque soirée musicale ou dansante donnée dans un lieu public. Ces différentes taxes remplacèrent les impositions perçues en vertu d’un arrêté royal datant du 19 novembre 1881. Ces taxes étaient établies pour un terme expirant le 31 décembre 1891 (‘).

On ne parlait pas encore ce taxe sur les débits de boissons, mais cela n’allait pas tarder.

Dans une délibération du Conseil Communal di 13 mars 1897, on constate que les caisses communales ont perçu :

des taxes sur les chiens 614 F

des taxes sur les débitants de boissons alcooliques 2.445 F

des taxes sur les pigeonniers 1.475 F

des taxes sur les voitures à ressorts 295 F

des taxes sur les orgues de Barbarie 80 F. pas tarder…

Le 1er août 1900, le Conseil Communal a voté les taxes et les débits de boissons sont redevables de 2.835 F de taxes.

Le 5 avril 1902, le Conseil Communal fixe comme suit les taxes :

5 F sur les pigeonniers, soit pour 407 pigeonniers 2.035 F

5F sur les voitures suspendues, soit pour 73 voitures 365 F

15 F sur les boissons alcooliques, soit pour 175 débits 2.695 F

Etant conné que depuis 1883, le montant des taxes perçues sur les pigeonniers et sur les voitures à ressorts n’ont pas été augmentées, on peut supposer qu’en 1897, année où apparaît pour la première fois la taxe sur les débits de boissons, le montant était pareil à celui de 1902, soit 15 F et dès lors, il y aurait eu à Carnières, dès 1897, 163 débits de boissons reconnus et recensés; la fraude ayant toujours existé, on peut sans coute encore en compter quelques-uns de plus.

En 1900, on trouvait 189 cafés.

En 1902, on en comptait 175.

En 1904, les 158 débits ce boissons recensés ont payé 2.370 F de taxes.

Le 2O janvier 1905, le Conseil Communal propose d’établir de nouvelles taxes, afin de faire face aux exigences de la Commune et se tourne vers les cabaretiers ne vendant que de la bière. La proposition est rejetée.

Au Conseil Communal du 8 mars 1905, on demande de mettre à la disposition de la police, tous les moyens que la loi autorise, pour contrôler les taxes et au besoin arriver ainsi à prévenir le Receveur de ceux qui fraudent.

Le 23 mai 1905, le Conseil Communal compte comme taxables, 147 débits à 15 F, soit un total de 2.205 F.

Au Conseil Communal du 4 mars 1908, demande des cabaretiers de la Chaussée (Placard) « d’une certaine tolérance sur la retraite pour les cabaretiers des abords des fosses ». Le conseiller Biche propose de fixer à 1 h. du matin la fermeture desdits ca-barets. En conclusion, l’heure de fermeture est fixée à minuit le dimanche et à 1 h. la semaine.

Le 10 avril 1909, le Conseil Communal dénombre 141 débits à 15 F, ce qui rap- porte 1.780 F.

Le 27 février 1911, une réglementation sévère et détaillée voit le jour. « Renouvellement de la perception des taxes : pour un terme de dix ans, pour les débits de boissons. Cette imposition est fixée à quinze francs et vise les débitants en détail de boissons alcooliques, c’est-à-dire ceux qui vendent ou qui livrent par quantité de cinq litres et en dessous ainsi que ceux qui, chez eux ou ailleurs, mais dans un lieu accessible au public, donnent à boire des boissons alcooliques.

Art. 6. Tout principal habitant de maison, ou partie de maison est tenu de déclarer par écrit, à l’administration communale, s’il est débitant de boissons alcooliques…

Art. 16. Quant aux taxes sur les débits de boissons, elles sont dues pour toute l’année si la déclaration en est exigible dans le courant du premier semestre. Si cette exigibilité se produit dans le courant du second semestre, elles sont réduites de moitié.

Art. 22. L’omission des déclarations prescrites par les dispositions qui président ou toute fausse déclaration sera punie d’une amende égale au droit fraudé; la condamnation à l’amende ne dispense pas du paiement de la taxe.

En cas de récidive, l’amende sera doublée.

En cas d’insolvabilité, l’amende sera remplacée par un emprisonnement d’un à cinq jours.

Art. 23. Seront passibles des mêmes peines, les débitants de boissons alcooliques qui refuseront d’admettre les fonctionnaires ou agents de la police locale dans les parties de leur demeure qui leur servent de débit… »

Le 27 juillet 1912 : après avoir reçu communication de la lettre envoyée par M. le Gouverneur du Hainaut sous la date du 24 juin dernier, le Conseil Communal adopte, à l’unanimité moins une voix, les vœux émis par les ligues antialcooliques de la province de Liège au grand meeting tenu à Liège le 21 avril 1912, savoir :

1°) Que les législateurs belges votent à bref délai une loi qui diminuerait, par voie d’extinction, le nombre des débits de boissons en Belgique.

2°) Que les autorités communales, en vertu du droit que leur confère la loi communale (art. 78), votent les règlements soumettant les débits de boissons existant ou à établir sur leur territoire, à des règles sévères d’hygiène et de moralité.

Le 29 janvier 1913,

Le Conseil Communal… Décide à l’unanimité :

A partir du 1er janvier 1913 et jusqu’au 31 décembre 1920, l’imposition communale annuelle de quinze francs frappant les débitants en détail de boissons alcooliques s’appliquera à tous les débits de boissons spiritueuses ou fermentées, ainsi qu’aux marchands de vins et liqueurs.

Le 14 mai 1913, le règlement sera complété : … « ainsi qu’aux marchands de vins et liqueurs dûment patentés, résidant dans la commune et vendant par quantités inférieures à cinq litres ».

En conclusion, on peut constater qu’à partir de 1900 il y a une diminution du nombre de débits de boissons avec une prise de conscience des autorités dès 1912 de la nécessité du juguler la montée de l’alcoolisme.

A.M. MARRÉ-MULS.

(1) Notes manuscrites de G. Decamps.

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