Evoquer les Warocqué c’est évoquer Morlanwelz, tant ils ont marqué leur village. Evoquer les Warocqué, c’est – bien au-delà – évoquer «les grands bourgeois au XIX° siècle», leur vie quotidienne, dans une saga réellement romanesque, qui débordera sur le XX°.

Les Warocqué, c’est un mélange de relations familiales parfois tragiques, d’événements dramatiques, où la richesse, le pouvoir économique et politique sont, avec la reconnaissance, les moteurs essentiels. C’est l’expression des grands principes, fut-ce au prix du malheur des siens. C’est la rigueur dans la gestion des affaires, matinée de ce qu’il faut de paternalisme mais tout empreinte d’une philanthropie considérable, et qui s’avèrera sans limite, quand il sera écrit que le nom s’éteindra. C’est qu’évoquer les Warocqué, c’est évoquer une lignée qui, sur quatre générations, aura alors créé la fortune qu’on disait alors première fortune de Belgique.

Nicolas Warocqué

Nicolas Waroqué (1773-1838)
sculpteur Godefroid Devreese
(Musée de Mariemont)

Elle commence véritablement à Mons, en 1773, le 17 juillet, à la naissance de Nicolas Warocqué, dans une famille bourgeoise de 11 enfants, dont seulement trois survivront. Le père, Pierre Joseph Warocqué est marchand et la mère, Marie Thérèse Duvivier est la soeur de Joseph-Maximilien Duvivier, un médecin montois.

Dans une lutte acharnée avec son frère Isidore à la recherche de biens fonciers et d’exploitations minières, ils jettent leur dévolu sur Mariemont. Nicolas en deviendra administrateur-délégué tandis qu’Isidore, qui s’oriente vers la banque, connaîtra la banqueroute.

C’est Nicolas qui, pour asseoir la dynastie et entrer dans l’histoire, fait ériger en 1831 le Château de Mariemont, sur un site précisément chargé d’histoire, de l’histoire, et même de la grande histoire.

Là où Marie de Hongrie, sœur de l’empereur Charles Quint, et qui a donné son nom au lieu, avait décidé de faire construire en 1546 un pavillon de chasse. Ce pavillon de chasse, construit comme le Château de Binche, par l’architecte Jacques du Broeucq, fut incendié en 1554 par les troupes du roi de France.

Là où, en 1605, les archiducs Albert et Isabelle décideront de faire une résidence royale de prestige, véritable château avec l’ajout de 4 pavillons d’angle, d’une chapelle, d’une tour et d’un jardin fastueux avec de multiples jeux d’eau. Ce fut l’oeuvre de l’architecte Wenceslas Cobergher, qui remania les ruines du pavillon de Marie de Hongrie et l’agrandit. Il n’en reste rien.

Le château de Mariemont vu depuis les jardins vers 1777 (JB Simons 1717-1783) Musée de Mariemont

Là encore où Louis XIV fera l’une de ses résidences royales durant 10 ans.

Là où, sous les Habsbourg, résidera l’archiduchesse Marie-Élisabeth d’Autriche, qui voulut en faire en 1734 un lieu de thermalisme, concurrent de Spa dont il reste des vestiges, ambition qui tourna court.

Là où, en 1741 le Gouverneur des Pays-Bas, Charles de Lorraine s’établira et fera construire un palais, écrin de ses chasses, fêtes et réceptions qui ne résistera pas à la Révolution française, en 1794.

Mariemont – la drève source Généanet licence CC BY-NC-SA 2.0 FR DEED
Mariemont – l’entrée haute du Parc – source Généanet licence CC BY-NC-SA 2.0 FR DEED

Nicolas Warocqué en confie la conception à l’architecte Tilman-François Suys, dont on dit qu’il aime «interpréter les données antiques pour les rendre applicables à l’emploi de la pierre bleue». Petersen dessinera le jardin. Mais Nicolas n’aura pas l’occasion d’occuper le château. C’est Abel qui en sera le premier occupant, en 1836.

Mariemont – le château

Alors, la vie de château pourra commencer pour les Warocqué, au sens plein du terme et la dynastie prendre ses marques.

Mais reprenons les choses dans l’ordre.

Le temps de préciser que Nicolas se consacrera aux affaires mais aussi à la politique et qu’il sera bientôt maire de Morlanwelz : on est sous l’occupation française, et c’est bien de maire et de mairie dont il s’agit.

Il se révèlera orangiste en 1815, ce qui s’avère inconfortable en 1830.

En réalité, il trace la voie en s’installant dans cette nouvelle aristocratie de pouvoir qui marie affaires et politique. Il meurt en 1838, laissant sa veuve, Cécile, et trois enfants : deux filles : Mathilde, qui décède à 14 ans et Mélanie, qui épousera un négociant, originaire de Valencienne, Jean-Edouard Hamoir.

Abel Warocqué

Abel Waroqué (1805-1864) – sculpteur Godefroid Devreese (Musée de Mariemont)

Et un fils, Abel, né à Mariemont le 7 novembre 1805. Il sera aussi bourgmestre en 1836, une charge que les Warocqué occuperont, de père en fils, jusqu’en 1917. A l’image de son père, Abel voue une passion compulsive aux affaires, aux acquisitions immobilières et un goût certain pour la spéculation, au service de sa fortune autant que de son souci de prestige, voire d’une forme de vanité.

A suivre

Bernard Chateau


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