Ces “notes folkloriques” ont été rédigées à partir de monographies de José Decamps, chapitres qu’il intitule précisément “notes folkloriques”. Chacun constitue un tout, sur un sujet donné, précisé en titre. On retiendra que ces notes remontent au début du siècle dernier, autour des années 1920.

Le terme folklore provient des mots anglais folk, peuple et lore, science. Il désigne donc l’ensemble des traditions, légendes, chansons et usages populaires d’un pays.

Il nous a semblé fort intéressant de rechercher comment vivaient nos prédécesseurs et quelles étaient les histoires qu’ils se racontaient…

José Decamps (1884-1966), fils du Gonzales Decamps que nous connaissons bien, avait entrepris de rédiger une monographie sur Carnières, d’après les nombreuses notes de son père. Mais lui non plus, n’a pas eu le temps de terminer son ouvrage; il nous a cependant livré quelques chapitres manuscrits dont l’un s’intitule « Notes folkloriques ».

C’est à partir de ces notes que nous allons tenter de vous présenter en plusieurs articles, ce que fut la vie d’antan à Carnières.

Les notes mêmes de José Decamps sont le témoignage d’une époque; elles ont été écrites dès 1920 environ et nous reprendrons le texte même de José Decamps, avec toutefois quelques remarques explicatives.

« Les études folkloriques prennent aujourd’hui leur place dans les monographies de nos communes. Bien qu’à Carnières, il n’existe presque plus de ces choses qui sont des témoignages ce jadis, bien que notre vie actuelle, plus trépidante, plus active, plus universelle enlève chaque jour un peu de ce qui reste des traditions anciennes ou particulières, nous avons tout de même pensé qu’il était intéressant de consacrer quelques pages à la façon de vivre d’autrefois et d’aujourd’hui.

Il est fâcheux que les documents qui peuvent servir à cette fin ne soient guère nombreux. Ceux qui existent présentent néanmoins quelque curiosité. Tels par exemple les Comptes de la Table des Pauvres et de l’Eglise, le Greffe Scabinal, les plaids de justice et même des chirographes ordinaires dont l’analyse nous a fourni d’utiles indicaTions. De même quelques notations faites par nos aïeux, la lecture d’anciennes lettres privées, des rappels à la tradition nous ont apporté quelques renseignements.

Jusqu’au début du XIXe siècle, le village eut l’aspect général des paroisses essentiellement agricoles. Le relief tourmenté de son sol, les grands bois qui couronnaient le faîte des collines, la présence d’un tas de petits ruisseaux et l’éparpillement un peu à la diable de toutes ses maisons devaient lui donner un cachet éminemment pittoresque. Les descriptions qui nous ont été données par les voyageurs des siècles passés, tout en élevant des récriminations au sujet des routes et des chemins, franchement détestables, s’accordent à louer le caractère pastoral et charmant de l’endroit.

A part quelques fermes ou censes de moyenne importance, presque toutes les demeures s’entouraient d’un jardin et d’un pré clos de haies de charme ou de coudrier, formant ainsi ce qu’on appelle des courtils ou closières. Généralement, ces courtils portaient une dénomination particulière rappelant soit le nom d’anciens propriétaires, soit un fait local, soit encore une circonstance géographique ou historique. Il y eut ainsi le Courtil Noncle Baudoin, le Courtil Piérart à deux grains, le Courtil du Leup (du loup), le Courtil des Chanoines, etc…

La maison n’avait qu’un rez-de-chaussée; elle comprenait généralement une
grande salle – la salle familiale – donnant accès à une salle de débarras, genre de remise, aux chambres à coucher et souvent à une écurie ou à une étable. Les portes étaient basses, les fenêtres petites. Le toit était couvert de chaume. La pierre, une espèce de grés grisâtre, ou bien encore de gros cailloux provenant de blocs erratiques (blocs arrondis ou anguleux, qui subsistent après le recul d’un glacier) servaient à la bâtisse. Ces matériaux se rencontraient du reste dans le sol du village. L’intérieur était pavé de carreaux d’argiles rouges. Souvent aussi une cendrée recouvrait le sol. Les murs étaient blanchis au lait de chaux; quant aux cheminées, hautes et larges, elles avaient été aménagées dès la seconde moitié du XVle siècle pour l’usage de la terre houille. Vers 1880, les dernières de ces humbles demeures avaient disparu ou bien avaient subi des transformations radicales.

L’ameublement était sommaire; une table lourde et massive généralement sans style, des selles (chaises) de bois, une dresse (commode) parfois jolie, des lits rustiques mais solides faits de noyer ou de chêne, ces essences abondant jadis. Les lits, en alcôve, ne se rencontraient que rarement.

Pour placer les vêtements, le linge et les menus objets auxquels ils tenaient le plus, les habitants possédaient un coffre de bois de grande dimension, très solide, pourvu de charnières résistantes et d’une serrure compliquée. Certains de ces coffres servirent à plus de six générations… Au commencement du XIXe siècle, l’usage des grands coffres fut presque abandonné. Ceux qui existaient alors servirent à remiser l’avoine dans les écuries et là, au cours des années, ils tombaient en débris.

Vers la fin du XVIle siècle, tout en conservant le coffre ancestral, les plus aisés du village eurent une garde-robe qu’ils dénommèrent le meuble, terme du reste encore employé.

A quelle époque les horloges firent-elles leur apparition? Il y a là quelque chose de difficile à préciser. Il est certain cependant que vers le milieu du XVIlle siècle, la plupart des demeures possédaient une horloge dite « à caisse». Il y en avait de très jolies. Malheureusement, on les a détruites, on les a laissé tomber en ruine ou bien encore, lorsqu’elles possédaient un certain cachet, elles ont été achetées à vil prix par des brocanteurs ou des antiquaires. »

A.M. MARRÉ-MULS.

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