Lors du transfert des archives du C.R.E.C.C. dans les locaux de son futur musée, je découvre un palmarès de l’Ecole moyenne de l’Etat pour garçons à Binche, datant de 1914. Ce document attire l’attention de l’ex-enseignante que je suis et m’incite à l’examiner plus en détail.

La couverture annonce la « Distribution des Prix» pour le 3 août à 3 heures. Quel est l’état d’esprit des personnes qui se rendaient à cette manifestation ? Inquiétude pour certaines, n’y a-t-il pas eu à Sarajevo, le 28 juin l’assassinat de François-Ferdinand, archiduc héritier d’Autriche-Hongrie et de son épouse, suivi en France, à Paris, le 31 juillet de l’attentat de Jean Jaurès. Insouciance pour les optimistes, même si une guerre éclatait, pourquoi la Belgique ne resterait-elle pas neutre comme lors du conflit franco-allemand de 1870? Euphorie certainement pour la jeunesse : n’est-elle pas à la veille ce longues vacances !

Longues? Nos petits écoliers de 1989 ne seraient certes pas de cet avis. A côté des deux mois de « grandes vacances» dont ils jouissent, ceux de 1914 devaient se contenter de beaucoup moins. Les comptes-rendus des Conseils communaux nous apprennent que pour l’enseignement communal primaire à Carnières (1), les vacances d’été courent du 22 août au 26 septembre en 1898, les dates restent approximativement les mêmes jusqu’en 1901, soit 5 à 6 semaines seulement; il faut ajouter les 1/2 jours de congé du jeudi après-midi mais aucune autre suspension pendant le reste de l’année scolaire. A partir de 1902, légère modification : les vacances d’été s’étalent du 11 août au 22 septembre.

En 1904, innovation: les congés de Noël sont instaurés du 26-12-1904 au 2-1-1905 inclus.

Pâques 1907, premières vacances, du 25 mars au 8 avril et autre nouveauté, congé le lundi de Laetare à condition de venir à l’école le jeudi suivant après-midi.

A partir de ces dates, les congés se multiplient : lundi de Laetare, 1er mai, lundi de St-Hilaire, le 5 décembre (lendemain de la Ste-Barbe), mais toujours avec récupération le jeudi suivant.

Le statu-quo se maintient jusqu’à la guerre 1914.

Mais revenons à notre palmarès. En couverture toujours, le nom de l’imprimeur : F. Bourgeois et Fils – Imprimerie mécanique (installation électrique).

La chose mérite d’être signalée, pour l’époque, elle est exceptionnelle; en effet, les imprimantes sont le plus souvent à pédale et le resteront longtemps encore; chez de nombreux artisans, quand moteur il y avait, il était « à gaz ».

En page 2, nous trouvons la liste des membres du Bureau administratif et du Personnel enseignant. Et nous voilà de retour à Carnières; nous lisons en effet que le professeur de religion n’est autre que M. l’Abbé Marievoet, futur curé de notre paroisse St-Hilaire. Ordonné prêtre en 1912, il est nommé vicaire de la paroisse St-Ursmer à Binche et est chargé d’assurer les cours de religion dans des établissements scolaires.

Après un passage par Jolimont (no 1 Haine-St-Paul, paroisse St-Hubert), il nous arrivera en 1942 en remplacement de M. le Curé Gailly.

A Binche, deux demi-heures de religion sont prévues dans les 3 classes de la section préparatoire, deux heures de cours en section moyenne. Cet horaire n’a subi aucun changement jusqu’à ce jour. Il est précisé que « les élèves sont conduits à la messe le dimanche et au catéchisme s’ils préparent leur première communion » (entendez notre actuelle communion solennelle). La neutralité de l’Enseignement de l’Etat est donc bien respectée.

Le personnel enseignant comprend, en outre, 3 régents, 4 instituteurs et un professeur de musique. Que nous sommes loin des établissements scolaires actuels dont le personnel dépasse le plus souvent la centaine.

Les pages 3 et 4 sur lesquelles figurait le règlement sont malheureusement arrachées. Impossible d’établir une comparaison avec les usages de 1989. D’ailleurs si règlement il y a encore, jusqu’à quel point son application est-elle encore rigoureuse.

Sur les huit pages suivantes, s’allonge un prestigieux « Tableau d’Honneur », liste nominative des succès remportés par les élèves depuis la création de l’école en 1882. En le parcourant, j’y découvre les noms d’anciens Carniérois, raison supplémentaire pour attiser ma curiosité. Nous apprenons ainsi qui :

1907 Borgne Honoré a obtenu au Concours Littéraire catégorie B la 2e mention honorable et la 4e place sur 110 concurrents. Au Concours scientifique catégorie B, le 2e prix et la 2e place.

1907 Brancart Omer remporte un prix en cat. C. Il obtiendra ensuite avec distinction à l’Institut Commercial des Industriels du Hainaut, le diplôme d’ingénieur Commercial.

1910 Lepage Marc remporte le 7e accessit ou 17e place sur 397 concurrents au Con- cours littéraire catégorie A. Il entrera à l’Institut commercial des Industriels du Hainaut, ainsi qu’un autre Carniérois Debast Robert. Venons-en au « Palmarès de l’année scolaire 1913-14». En section préparatoire, parmi les nonante élèves cités, nous ne relevons le nom d’aucun enfant de Carnières. Ils sont presque tous de Binche, quelques-uns de Ressaix. Estinnes, Leval, Buvrinnes. En section moyenne, un élève de Mont-Ste-Aldegonde. Nous y reviendrons dans un prochain article.

Nous terminerons en marquant notre admiration pour ces jeunes Carniérois qui chaque jour à pied, à vélo se rendaient à Binche ou à Cronfestu, la ligne de chemin de fer Haine-St-Pierre – Binche représentant le trajet le plus facile, le tramway vers Anderlues n’existant pas encore à l’époque.

(1) renseikgnements fournis par A. Marré-Muls

A. DEPERSENAIRE.

Accueil » UN PALMARES SCOLAIRE AU DEBUT DU XX° SIECLE