Après l’invasion et l’occupation de Carnières (entre autres), Marie Philippe (de la famille des Mimir) et son époux, Cornélis Van der Hoeven (de nationalité néerlandaise et donc neutre) (1) purent revenir à Carnières, grâce à un laissez-passer allemand (qui sera supprimé dès 1915), afin de revoir la famille et se rendre compte de la situation.
Comme Marie connaissait déjà l’existence des camps de jeunes soldats belges, réfugiés, désarmés et internés aux Pays-Bas, après l’invasion rapide du pays, elle entreprit d’organiser un réseau de correspondance entre les familles et leurs fils, avec la coopération courageuse de Clémence « du Péchon » Celle-ci avait l’habitude de se rendre tous les jeudis à Bruxelles au moyen de sa charrette tirée par un cheval, pour s’y fournir en poissons qu’elle revendait de porte à porte à Carnières. Elle continua pendant la guerre. Le réseau s’organisa.
Marie, de son côté, rassemblait le courrier des soldats, le confiait à un passeur hollandais (un poissonnier ?) qui le remettait ensuite à Clémence, à Bruxelles. Celle-ci le cachait sous ses poissons puis, une fois revenue à Carnières, en déposait une partie chez Irma Philippe (2) et l’autre chez Charles Philippe (3) (c’est-à-dire chez ma grand-mère, rue des Martinières) sœur et frère de Marie.
Tous deux se chargeaient de porter les lettres dans chacune des familles concernées, puis y retournaient pour rassembler les réponses qu’ils confiaient alors à Clémence. Il parait que les familles féminisaient les prénoms de leurs fils (Henri en Henriette par exemple), par prudence, au cas ou….
Ce réseau clandestin a fonctionné pendant toute la guerre et semble avoir fonctionné sans ennuis !
En plus de se charger du courrier, Marie s’occupait aussi des soldats. Elle leur rendait visite, leur apportait quelques douceurs et leur prêtait de l’argent pour améliorer leur ordinaire plutôt maigre et leur remontait le moral. (Les prêts furent remboursés scrupuleusement par les parents, après la guerre).
Après l’Armistice et le retour des soldats, la Commune de Carnières décida de remercier Marie en l’invitant officiellement à une cérémonie organisée dans la Maison Communale, où elle fut fêtée et reconduite en cortège chez sa sœur Irma.

Fig. 1 Cortège venant de la Maison communale et montant la rue qui conduit à la Place Verte (où habitait Irma Philippe, ép. Busquin). Marie Philippe (au bouquet de fleurs) juste après la fanfare.

Fig. 2. Photo prise (après le cortège ?) devant la maison d’Irma Philippe. Au ler rang, au milieu : Marie Philippe (avec fleurs); à sa gauche sa sœur Irma (ép. Busquin); un des 2 “‘postiers” Au fond, sur le côté de la fenêtre, Charles, frère de Marie, autre “postier”.
– à sa droite, ma mère, Georgette Balestin (16-17 ans).
– au ler rang, la 2ème à gauche de la photo, ma grand-mère Adolphine Warolus, veuve Al. Balestin, ép. en 2ème noces de Charles Philippe, veuf également.
– les autres sont de la famille Philippe (Mimir).

Aline Souris
Fille de Georgette Balestin-Warolus



(1) Marie Philippe (de la famille des Mimir, du nom d’un ancêtre prénommé Casimir), épouse de Cornélis Van der Hoeven, médecin réputé de La Haye (où Marie était allée travailler).
(2) Epouse Busquin, soeur de Marie.
(3) Frère de Marie.

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