Une méthode d’exorcisme

Dans une étude consacrée à la sorcellerie (1) et qui nous a aimablement été communiquée par M. Paulin Burgeon, l’auteur analyse les différents moyens de pratiquer, l’exorcisme c’est-à-dire, obliger la sorcière à « défaire ce qu’elle a fait» et donc opposer une force supérieure à celle du diable ou de son délégué.

La pratique la plus salutaire est l’exorcisme religieux; la lecture des premiers versets de l’Evangile de saint Jean avec imposition de l’étole, passe pour être un puissant exorcisme.

Cette croyance est appuyée sur « l’emploi que font les prêtres de ce texte dans les circonstances qu’on juge caractéristiques. Ils le lisent aux femmes qui « retournent à messe» après un accouchement « pour se purifier». C’est, dit-on, cet Evangile qui sert à «faire tourner le vent» dans les incendies, à chasser les mauvais esprits des demeures et des étables, à guérir des maladies mentales, à écarter les mauvais rêves, à guérir les enfants peureux et pleurnicheurs, etc. » (2).

A Carnières, existait un pèlerinage en l’honneur de saint Hilaire; il avait lieu le dimanche 5 mai ou le dimanche qui le suivait, lors de la ducasse, c’est-à-dire la dédicace de l’église. (Ce fut le 10 mai 1874 que l’église bâtie entre 1872 et 1874, fut livrée au culte). Saint Hilaire ayant sa fête le 14 janvier; c’est pourquoi les deux époques privilégiées pour aller vénérer saint Hilaire, étaient le 14 janvier et l’octave qui suivait, ainsi que l’octave du pèlerinage du mois de mai. Un reliquaire en bois peint en forme de bras était signalé au XVIle siècle et un buste en bois, polychromé, est encore vénéré de nos jours.

Ce pèlerinage était amplement connu de tout le doyenné et fidèlement fréquenté par la grande foule, surtout de Binchois qui n’hésitaient pas à effectuer le déplacement à pied, les pèlerins s’agenouillaient au banc de communion, l’enfant de chœur déployait une longue étole sur leur tête, le prêtre récitait l’oraison en mémoire du saint, et présentait la relique à baiser. » (3)

D’après Robert Dascotte, deux témoins lui auraient dit que « ce rituel a disparu en 1968. Ils ont ajouté que le curé récitait aussi le début de l’Evangile de saint Jean, lorsque l’étole était posée sur la tête des pèlerins. » (4).

On invoquait saint Hilaire pour les rhumatismes et les maladies nerveuses ; il sem- ble que la pose de l’étole avait encore un autre but : celui d’exorciser. Ce n’est pas étonnant dans un village dont on disait : « Carnières, pays de sorcières ».

A.M. MARRE-MULS.

(1) Oscar Colson, Les sortilèges et maléfices dans la tradition populaire wallonne ac-tuelle, dans Wallonia, no 3 et 4, Liège (mars-avril 1907, pp. 102-117.
(2) Oscar Colson, op. cit., p. 109.
(3) L’Ecole Sainte-Thérèse et son histoire de 1836 à nos jours, Carnières, 1979.
(4) Robert Dascotte, Religion et traditions populaires dans la région du Centre, Haine-Saint-Paul, 1982, p.78

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