Bruxelles et Hugo, touriste

Bruxelles et Victor Hugo, à qui il faut faire un sort particulier. Car s’il y a fait du tourisme, il y a aussi trouvé refuge à deux reprises, en exil et en proscrit, et pour des temps assez longs.

Sainte Gudule

Bruxelles Sainte Gudule et le quartier
Bruxelles Sainte Gudule et le quartier

C’est du haut de Sainte-Gudule qu’il embrasse la ville : « Toute la ville sous mes pieds, les toits tailladés et volutés de Bruxelles à demi estompés par les fumées, le ciel (un ciel orageux) plein de nuages dorés et frisés par le haut, coupés ras comme marbre par le bas; au fond, une grosse nuée lointaine d’où tombait la pluie comme du sable fin d’un sac qui se crève; le soleil jouant dans tout cela : la magnifique lanterne à jour du beffroi se détachant sombre sur les vapeurs blanches; et puis le bruit confus de la ville qui montait, et puis la verdure des belles collines à l’horizon, c’était vraiment beau. J’ai tout admiré, comme un provincial de Paris que je suis, jusqu’au maçon qui cognait sur une pierre et qui sifflait à côté de moi. »

Bruxelles-Sainte-Gudule
Bruxelles-Sainte-Gudule

Dans une lettre à sa femme il écrit : « Bruxelles, 17 août, 8 heures du soir. Chère amie, je suis tout ébloui de Bruxelles, ou pour mieux dire de deux choses que j’ai vues à Bruxelles: l’hôtel de ville avec sa place, et Sainte-Gudule. Les vitraux de Sainte-Gudule sont d’une façon presque inconnue en France, de vraies peintures, de vrais tableaux sur verre d’un style merveilleux, avec des figures comme Titien et des architectures comme Paul Véronèse ».

L’hôtel de ville

Bruxelles-Hotel-de-ville
Bruxelles-Hotel-de-ville

On sait que Victor a notamment logé, à Bruxelles, sur la Grand-Place au 26-27, dans la maison “le pigeon”, en 1852. Une plaque apposée sur la façade commémore la présence de l’illustre touriste. Le Pigeon, depuis le XV e siècle, était la propriété de la Corporation des peintres qui la vend en 1697 au tailleur de pierre et architecte Pierre Simon, auteur de la façade. C’est dire qu’il a eu tout le loisir de détailler son voisin d’en face, l’Hôtel de Ville, et la Grand-Place:

« L’hôtel de ville de Bruxelles est un bijou comparable à la flèche de Chartres ; une éblouissante fantaisie de poëte tombée de la tête d’un architecte. Et puis, la place qui l’entoure est une merveille. À part trois ou quatre maisons que de modernes cuistres ont fait dénaturer, il n’y a pas là une façade qui ne soit une date, un costume, une strophe, un chef-d’œuvre. J’aurais voulu les dessiner toutes l’une après l’autre ».

Contrefaçons bruxelloises

Bruxelles La Senne source: Institut royal du Patrimoine artistique
Bruxelles La Senne source: Institut royal du Patrimoine artistique

Mais ses sentiments pour Bruxelles, seront alternativement enthousiastes et baudelairiens : « Au demeurant, Bruxelles est bien la ville de la contrefaçon. Il y a des gamins comme à Paris; le fronton grec de sa chambre des états ressemble au fronton grec de notre chambre des députés ; le ruban amarante de Léopold est une contrefaçon de la légion d’honneur; les deux tours carrées de Sainte-Gudule, belles d’ailleurs, ont un faux air de Notre-Dame. Enfin, par un malencontreux hasard, la petite rivière qui passe à Bruxelles s’appelle, pas tout à fait la Seine, mais la Senne ».

Mais après tout, ne dit-on pas en effet que quand Paris s’enrhume, Bruxelles Belgique éternue…

A suivre,

Bernard Chateau,

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